Carole, quittée par son mari et loin de ses filles installées en Australie, n'hésite pas une seconde lorsque Curtil, son original de père, lui donne rendez-vous un peu avant Noël. Trois ans qu'elle ne l'a pas vu… Viendra-t-il ? Aussitôt, la voilà partie de Saint-Étienne où elle est enseignante et traductrice, pour retrouver avec émotion Val-les-Seuls, son village natal des Alpes, son frère aîné et leur soeur cadette. Tous deux sont restés au pays. Lui, Philippe, bon mari, bon père, bon écolo, est garde forestier dans le Parc de la Vanoise ; elle, Gaby, vit dans un bungalow misérable avec un emploi qui lui assure tout juste son existence et celle de « la Môme » recueillie dix-sept ans auparavant. Gaby, instable et fragile, attend son compagnon, à sa sortie de prison. Dans le gîte que Carole occupe à côté de la scierie d'un ami d'enfance, dans le bar où elle se réchauffe le corps et coeur au milieu du brouhaha et des ragots, les jours se succèdent gris et froids, puis éblouissants sous la neige… L'attente se prolonge. Dans une écriture riche de métaphores, imagée et pourtant sobre, rythmée par des éclats comme la vie même, Claudie Gallay dépeint l'existence rude des habitants d'un tout petit village de montagne. Le thème du récit et son leitmotiv semblent l'attente. Celle de la fratrie suspendue au retour du père, de Carole et Gaby privées de leurs hommes, celle enfin de tout un village en émoi, à la veille de se transformer en station de ski. Et avec cet oeil de photographe, qu'elle prête d'ailleurs à son héroïne, la romancière explore avec pudeur les meurtrissures du passé que rien n'apaise si ce n'est peut-être leur mise au jour par des mots qui libèrent et avivent les liens de fraternité. Un beau roman d'ambiance remarquablement construit où tristesse, grisaille douce-amère mais aussi verdeur réaliste se fondent en une âpre tendresse. Des pages, beaucoup de pages… mais attachantes, ô combien attachantes ! (source : les-notes.fr)