Dans une région montagneuse du Japon, des ouvriers commencent la construction d'un barrage situé en aval d'un village isolé que les eaux enseveliront ensuite. En acceptant ce travail à l'écart du monde, le narrateur tente de fuir son passé et ses orages intérieurs liés à des pulsions violentes et mortifères. Il observe la petite communauté autarcique des villageois, condamnée à quitter la terre de ses ancêtres et le lieu de leurs sépultures. Akiro Yoshimura (1927-2006) n'a cessé d'explorer la mort dans ses écrits (La guerre des jours lointains, N.B. août-sept. 2004). Avec une subtilité précise, cependant distanciée, il accompagne le cheminement intime de son personnage. On voit ce dernier s'imprégner de l'apparente indifférence des habitants, de leur inexplicable et silencieuse résignation. Son âme s'en trouve étrangement pacifiée. Cette catharsis, cette épuration des passions, se déroule dans une mise en scène qui souligne l'âpreté des coutumes ancestrales, la brutalité des mesures que génère le progrès, leur impact destructeur sur les êtres et la nature… L'inadéquation, toujours présente entre tradition et modernité, est résumée dans cette remarque du narrateur : « Le hameau qui avait bien voulu soigner ma blessure était en train de disparaître de la vallée. » Un récit beau dans sa sobriété et sa singularité. P. H. et A-M. D. (source : les-notes.fr)